Dans le Japon médiéval, l’ensemble des arts
martiaux était appelé « Bujutsu » : littéralement technique (ou
méthode) militaire. Comme dans la société médiévale occidentale, chaque
seigneur possédaient ses Bushis[1]
(ses soldats ou guerriers) ou plus exactement ses Samouraïs qui s’entrainaient
durement afin d’accéder à la maîtrise du combat. En effet, la société japonaise
était, à cette époque, rythmée par les guerres incessantes entre les différents
clans seigneuriaux. Les Samouraïs suivaient un entraînement extrêmement
rigoureux visant à leur faire atteindre la perfection dans leur art.
Un samouraï n'ayant pas de rattachement à un
clan ou à un daimyō (seigneur féodal) était appelé un rônin. Un samouraï qui
était un vassal direct du shogun était appelé hatamoto.
Cependant, tous les soldats n'étaient pas
samouraïs, ceux-ci constituant une élite équivalente en quelque sorte aux
chevaliers européens. L'armée, à partir de la période Kamakura (période
s’étendant de 1185 à 1333), reposait sur de larges troupes de fantassins de
base nommés ashigaru et recrutés principalement parmi les paysans.
Musashi Miyamoto avec deux bokken, estampe de Utagawa Kuniyoshi, Wikipédia 2018 |
Les premières illustrations de techniques
guerrières datent de cette époque et comme les moyens de transport et
communications étaient moins développés. Chaque région ou même village
possédait sa propre école de combat. D'où le foisonnement de style et d'écoles
de guerre. Chaque école, appelé « Ryu[2] »,
était dirigée par un maître[3]
accompli dans l’un des nombreux Jutsu existants (combats à mains nues, escrime,
archerie, etc.), qui était héritier de tous les secrets des techniques propres
au Ryu[4].
Figure 22 Takeda Shingen, image Wikipédia |
Contrairement à notre époque où les arts
martiaux à mains nues sont les plus pratiqués, l’époque médiévale japonaise est
caractérisée par les arts de guerre armés : sabre court et long, lance,
hallebarde, arc, bâton, etc. Le but est pour certains de devenir expert d’une
arme (archers par ex.) et pour d’autres de très bons « généralistes »
excellant dans le maniement de plusieurs armes. Cependant, on peut dire que les
Samouraïs apprenaient en général le Kenjutsu, le Jujutsu, le Bajutsu et le
Kyujutsu, respectivement art du sabre, lutte, art équestre, tir à l'arc.
À cette époque, le combat à mains nues est
l’ultime recours, utilisé dans le cas où le combattant est désarmé. Tous les
Ryu avaient leur spécificité, mais cherchaient avant tout une efficacité
pratique : par exemple, comme le confirmait Maître Ōtake Risuke Minamoto no
Takeyuki, titulaire actuel du titre de Shihan (Maître instructeur) de la
Tenshin Shōden Katori Shintō-ryū[5] :
son école ne possède que 36 techniques à main nues qui correspondent à toutes
les possibilités effectives d'attaques en armure sur un champ de bataille. Ce
n’est qu’au début de l’ère Meiji, que le combat sans arme devint majoritaire.
Dès l’avènement de l’ère Meiji (vers 1898), la
structure sociale changea brusquement : cette période représente la fin de
la politique d'isolement volontaire appelée Sakoku[6]
et le début de la politique de modernisation du Japon.
Une des principales mesures politiques a été
l’abolition de la classe guerrière des samouraïs. Beaucoup d’entre eux
choisirent de se reconvertir dans les affaires ou la politique. Du jour au
lendemain, les techniques de guerre devinrent inutiles dans un pays
fonctionnant comme une monarchie constitutionnelle. Alors que la classe
guerrière avait dirigé le Japon féodal durant près de 700 ans, elle devait sans
délai s’adapter à un régime de paix, elle qui était conçue pour des temps de
guerre.
D’un « savoir-faire » utile pour
défendre les terres du clan et en conquérir d’autres, le mode de vie de ces
« Jutsu » devint désuet.
De la technique à la Voie
Cependant, profondément imprégnés et
indissociables de la spiritualité
japonaise (Bouddhisme et Shintoïsme) ainsi que des cultures comme celles de
l’Inde et la Chine dans lesquelles le Japon a puisé, les Bujutsu évoluèrent en
Budo. Ces techniques qui furent vitales à la survie du clan devinrent dès 1898
des moyens permettant à l’homme de s’unir à son essence, à son Soi.
Dans les Bujutsu, la maîtrise technique était
une fin en soi alors que dans les Budo la quête de la maîtrise technique permet
de discipliner et de projeter toutes les émotions et les pensées afin de
réaliser un but : l’alignement des
trois corps, corps-âme-esprit.
Tout comme la guerre évolue selon des lois
précises (dont la stratégie), le Samouraï suit à l’époque un code de l’honneur,
la Voie du Guerrier ou Bushido[7]
et valorise des valeurs telles que :
1.
Gi : la décision juste
2.
Yu : la bravoure, le courage
3.
Jin : la bienveillance
4.
Rei : le comportement juste
5.
Makoto : la sincérité
6.
Meiyo : l’honneur
7.
Chugi : la loyauté
De plus, des sentiments comme la fidélité au
maître (et donc forcément à l’Empereur divinisé), le mépris de la douleur et le
rite du seppuku furent portés à leur paroxysme.
Autant leur éducation visait à dominer leurs
réactions instinctives, dont la peur et la lâcheté qu’ils méprisaient, ce qui
les rendaient extrêmement efficaces sur le champ de bataille, autant ils
cultivaient les arts tels l’écriture, la calligraphie et la philosophie dans le
privé. À l’image du fameux Miyamoto Musashi, connu tout autant pour ses 60 duels
victorieux que ses écrits et ses estampes.
Jean-Christian
Balmat
Fondateur
de la Méthode
[1] Bushi (武士) est un terme
d'origine chinoise signifiant littéralement « guerrier gentilhomme » en
japonais.
Le terme apparait pour la première fois
dans le livre d'histoire japonaise, Shoku Nihongi (続日本記) écrit sous l'ère Heian vers l'an 800.
Bushi et samouraï sont souvent confondus, mais ils correspondent à des périodes et des fonctions différentes. À
l'origine, bushi est le seul nom pour désigner les guerriers japonais.
Au XVIIe siècle,
au début de la période Edo, les shoguns Tokugawa créent une hiérarchie sociale
à quatre échelons surnommée « système shi-no-ko-sho » :
·
la
noblesse guerrière (士, shi = gentilhomme regroupé au sein de 武家, buke,
littéralement « maison des guerriers »),
·
les
paysans (農, nô),
·
les
artisans (工, kô),
·
et les
commerçants (商, shô).
Les bushi les
plus riches sont nommés daimyō. Ils sont entourés d'une troupe de guerriers
serviteurs reconnaissables au fait qu'ils portent deux sabres (daisho). Ces
guerriers serviteurs accompagnaient les daimyos lors des résidences alternées
obligatoires (sankin-kotai) à la cour du shogun.
Le mot Samouraï
provient du verbe sabouraü qui signifie « servir » ou « rester à côté de »,
lorsqu'il s'agit d'une personne importante. Le substantif du verbe sabouraü»
est sabouraï qui est devenu « samouraï » vers le XVIe siècle. Depuis cette
époque, le terme « samouraï » est utilisé pour nommer les différents types de
guerriers appliquant le code bushido.
Le bushi se
distingue donc du samouraï par son appartenance à la classe supérieure des
guerriers. Note extraite de Wikipédia
[4] L’ensemble de ces techniques étaient consignées en rouleaux appelé
Makimonos, conservés dans un temple shintoïste et honorés au cours de cérémonie
durant lesquelles des démonstrations de la technique avaient lieu.
[5] R. Otake, Le sabre et le divin. Héritage spirituel de la Tenshin
Shoden Katori Shinto Ryu, Paris, Budo Éditions, 2002
[6] Avant l'ère Meiji, le Japon était un pays fermé. Entrer ou revenir
dans l'archipel, sans autorisation expresse, était puni de mort immédiate, ceci
était valable autant pour les Japonais que pour tout étranger. Cet état de
chose appelé « Sakoku » a donné au Japon 250 ans de paix intérieure. Cela a
permis d’affiner et de perfectionner les arts, mais aussi, tout doucement, à
les scléroser. Note extraite de Wikipédia
[i] Article extrait du livre « Le Ninpo Nin-Jutsu au
21e siècle », 444 pages. Disponible sur Amazon.
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